Fleur et rocher mystiques

On trouve au plus haut des pâturages, en Savoie, une jolie plante à fleur rouge, de la famille des orchidées, dont la racine se partage en deux appareils façonnés comme les doigts d'une main. Chaque année, au printemps, l'un se détruit pour faire la place au second qui se développe au même moment. L'imagination des pâtres voit dans le premier la main du diable qui blesse et retire la vie, et dans le second la main de Dieu qui répare et féconde les herbes.

En face des Grands Plans, au-delà du vallon de Notre Dame de Tréicol, on voit un énorme rocher en forme de tour, nommé Pierra-Metta, dominant une longue cime qui sépare la vallée de Beaufort de la haute Tarentaise.
Suivant la tradition, ce rocher a été porté sur ce sommet par un géant qui avait autrefois tout pouvoir sur ces montagnes. Il aurait tiré ce rocher d'une crête voisine, en laissant à sa place une brèche qui maintenant sert de passage. Fatigué de la pesanteur d'un tel fardeau, il l'avait posé un instant pour reprendre haleine, mais il lui avait été impossible de soulever de nouveau le rocher, qui depuis lors est demeuré là comme un témoignage de l'impuissance finale de l'orgueil humain.
Ce personnage symbolique est nommé par la tradition Gargantua. Il s'asseyait sur la croupe des montagnes comme sur un escabeau fait à sa taille ; il se jouait des énormes sapins comme d'une paille légère ; il baignait ses pieds dans la profondeur des lacs.

Magasin Pittoresque (1850)

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