Le mari moqué

Le passé aimait plus la variété ; chaque cité avait ses habitudes et ses coutumes. À Mende, il y en avait de fort bizarres. Si un homme était connu pour sa faiblesse, si l’on savait que, chez lui, c’était la femme qui exerçait l’autorité, les voisins s’assemblaient, saisissaient le couple et organisaient à ses dépens une cérémonie grotesque ; on étendait de la paille devant sa maison : puis le mari, portant un sac sur le dos, devait tourner plusieurs fois comme un cheval de cirque, tandis que sa femme le suivait en frappant son sac à coups de bâton et criant : « Travaille ! » Tous les habitants du quartier formaient le cercle et criblaient les deux patients d’épigrammes.

Cette humiliation infligée aux Chrysales s’explique par le dédain que les Mendois éprouvent pour les femmes. Aujourd’hui encore ce sentiment est resté vivace dans le Gévaudan tout entier. Un paysan dit toujours « J’ai trois enfants et deux filles ». Un autre, en apprenant la naissance d’une fille, disait au père « Vous ne pouviez avoir moins c’est encore à recommencer ».

Jules BARBOT (1899)

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